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Syrie-France : Refus de visa pour Hussam Hammoud : la France met un journaliste syrien en danger
lundi 12 septembre 2022, par
Source : https://blogs.mediapart.fr/francois-bougon/blog/060922/refus-de-visa-pour-hussam-hammoud-la-france-met-un-journaliste-syrien-en-danger?utm_source=AC1&utm_medium=email&utm_campaign=Mailing_20220907_Hussam&utm_content=&utm_term=&xtor=EREC-1036-[AC1]&M_BT=1289581865541
Billet de blog 6 sept. 2022
Refus de visa pour Hussam Hammoud : la France met un journaliste syrien en danger
Notre collaborateur, Hussam Hammoud, 30 ans, qui vit actuellement en exil en Turquie, avait déposé une demande de visa dit « humanitaire » pour pouvoir faire une demande d’asile en France avec sa famille. Mais, lundi 5 septembre, il a reçu un courriel type de rejet. Une abomination.
François Bougon
Journaliste, chargé du pôle International à Mediapart
Journaliste à Mediapart
Hussam Hammoud, 30 ans, est originaire de Raqqa, dans le centre de la Syrie. Sa carrière de journaliste-activiste a débuté au moment de la révolution contre Bachar al-Assad en 2011. Depuis, il n’a cessé de témoigner de la réalité dans son pays, malgré les dangers encourus, pour différents médias internationaux, parmi lesquels Mediapart (nous publions ce mardi 6 septembre son dernier article, lire ici)&M_BT=1289581865541], souvent en collaboration avec la journaliste française Céline Martelet.
En octobre 2019, avec sa femme et ses deux enfants, menacé par différents groupes armés, il a dû fuir en urgence Raqqa lorsque la Coalition internationale s’est retirée de la zone. Puis il a pu rejoindre la Turquie et s’est donc installé à Gaziantep. Il a reçu il y a quelques semaines et hier encore des menaces de mort parce qu’il enquête sur les cellules de financement de l’État islamique présentes en Turquie. Depuis plusieurs jours, il ne sort quasiment plus de chez lui, et vit avec la peur d’être attaqué dans la rue.
Ce départ précipité et bien d’autres éléments de son histoire personnelle et professionnelle, il les a détaillés longuement aux fonctionnaires de l’ambassade de France d’Ankara, qui l’ont reçu à deux reprises en avril et en juin de cette année. Il leur a également raconté son activisme contre Bachar, son combat ensuite contre l’État islamique, son arrestation par des djihadistes étrangers, la torture...
Il le faisait dans le cadre de sa demande de visa dit « humanitaire » pour pouvoir faire une demande d’asile en France avec sa famille. La procédure a déjà fonctionné pour de nombreux journalistes syriens. « Hussam s’est investi avec moi et d’autres journalistes à fond dans des enquêtes journalistiques pour documenter toujours et encore les crimes de Daech, leurs agissements depuis la chute de Baghouz et ce sans aucune protection. Il n’a pas de carte de presse », témoigne auprès de Mediapart Céline Martelet.
Cette dernière l’a rencontré en mai 2019 lors d’un reportage sur les frères Clain. « C’est grâce à lui que je localise l’appartement de Jean-Michel Clain et surtout le bureau des étrangers où nous découvrons des documents de Daech. Notamment des cartes d’identités éditées par l’État islamique mais aussi un livre de compte comprenant des centaines de noms. Hussam me demande de les ramener en France. Ce que l’on fait avec Edith Bouvier. Les documents sont remis au PNAT [Parquet national antiterroriste – ndlr], lorsque je suis entendue pour expliquer comment ces preuves arrivent à Paris je mentionne Hussam à plusieurs reprises. Les agents qui m’entendent me disent : “Il doit être entendu aussi, son travail est très important”. » Voir ici le reportage diffusé après cette découverte sur BFMTV.
Mais lundi matin, il a reçu un courriel type, froid et ravageur : « Madame, Monsieur, Je suis au regret de vous informer que la demande de protection de votre famille n’a pas été acceptée par les autorités françaises. Je vous informe, à toutes fins utiles, que vous avez la possibilité de vous adresser à la représentation du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) en Turquie. Vous pouvez contester la décision de refus devant la Commission des Recours contre les décisions de Refus de Visa d’entrée en France, en écrivant dans un délai de deux mois à compter de la date de la notification à l’adresse suivante : CRRV, BP 83609, 44036 Nantes CEDEX 1.
Je vous prie d’agréer mes salutations distinguées. »
Sur Twitter, Hussam Hammoud a réagi par ces mots : « Détruire la vie et les rêves de quelqu’un est si facile pour quelqu’un qui a tout ! Aujourd’hui ma demande d’asile à #France a été rejetée sans aucune explication. Je ne sais pas ce que je pourrais apporter de plus que toutes les enquêtes sur lesquelles j’ai travaillées pour les plus grandes agences médias françaises. Merci pour rien !! »
Aucune explication ne lui a été donnée sur ce refus, souligne-t-il auprès de Mediapart. De nombreux confrères ont exprimé leur soutien. Dans Libération, Hala Kodmani « voudrait croire que les vacances des responsables les plus avertis de la situation syrienne au ministère de l’Intérieur soient la cause d’un refus bureaucratique en plein mois d’août ». L’Élysée a été contacté. Hussam Hammoud attend des explications plus précises. Nous aussi. Il est encore temps pour la France d’être à la hauteur de ses valeurs sur ce dossier. Le rejet de sa demande d’asile est une abomination de la part de l’État français, et une indignité qui rejaillit sur nous-mêmes en tant que citoyens de ce pays, et journalistes.
Le plan pour accueillir Hussam avec sa famille en France était prêt. Ils avaient un logement, une école pour les enfants, qui ont déjà commencé à apprendre à parler français, comme Hussam et sa femme Fairouz d’ailleurs.
VIDEO ici :&M_BT=1289581865541] Refus de visa pour Hussam Hammoud