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France : Riss, directeur de CharlieHebdo : l’homme qui met les points sur les « i » de l’islamisme
samedi 24 septembre 2022, par
Riss : l’homme qui met les points sur les « i » de l’islamisme
Par Judith Waintraub
Publié hier à 06:02
Les attentats du Bataclan et du Stade de France font l’objet d’un hors-série de Charlie Hebdo. Son directeur pense qu’« on en a encore pour un siècle avec l’islamisme ».
L’actualité judiciaire a de quoi réveiller les pires cauchemars du directeur de publication de Charlie Hebdo : le procès en appel de deux des condamnés des attentats de janvier 2015 contre l’hebdomadaire et contre l’Hyper Cacher s’est ouvert le 12 septembre et celui de l’attentat de Nice va entrer dans sa cinquième semaine. Riss, touché par une balle à l’épaule, a dû de nouveau témoigner. Il assiste à la plupart des audiences par choix. Sans perdre sa capacité à rire et à faire rire, de ce rire dont Pierre Desproges disait qu’il « peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles ».
« Un procès, dit le dessinateur rescapé, permet de se réapproprier l’événement et de ne pas le subir. Il a aussi une vertu pédagogique, il rend les choses claires pour le public. » Raison pour laquelle Charlie Hebdo sort un hors-série consacré à un autre procès, celui du Bataclan. On y trouve entre autres textes et illustrations certaines des chroniques de Sylvie Caster, dont l’intégralité est publiée par ailleurs dans un passionnant recueil intitulé 13 novembre *.
À la fac, ces jeunes hérauts de la laïcité qui vivent sous les injures : https://www.lefigaro.fr/actualite-france/a-la-fac-ces-jeunes-herauts-de-la-laicite-qui-vivent-sous-les-injures-20220901
Au fil des audiences, qu’elle a suivies de bout en bout pour Charlie Hebdo, la journaliste a été frappée par la réticence des juges à mettre les points sur les « i » d’ « islamisme ». C’est aussi ce qu’avait regretté Riss après le procès en première instance des attentats de janvier 2015. « Le tribunal n’a pas insisté beaucoup sur leur dimension idéologique, sans doute par crainte du procès politique, analyse-t-il après coup. Il avait fallu la plaidoirie de Richard Malka pour repositionner les choses. » L’avocat de Charlie avait retracé devant la cour la chronologie des atteintes les plus meurtrières à la liberté d’expression perpétrées par des islamistes en partant de l’assassinat du cinéaste hollandais Theo Van Gogh, en 2004.
La tentative d’égorgement de Salman Rushdie, cet été, est le dernier événement en date à s’être ajouté à la liste. Riss veut croire que depuis, « tout le monde a compris qu’il ne s’agissait pas d’une histoire de caricatures, comme il avait été dit au procès que nous avaient intenté la Grande Mosquée de Paris et l’Union des organisations islamiques en France (UOIF, devenue Musulmans de France, NDLR) en 2007, mais d’un problème qui concerne la société tout entière ».
D’autant que la soumission aux diktats islamistes est plutôt en progression, notamment chez les jeunes, comme le montrent tous les sondages sur le sujet et comme le dessinateur peut le constater lui-même quand il se rend dans des collèges et des lycées. « Je vois beaucoup d’ignorance, ils n’ont pas de repères historiques et politiques, soupire-t-il. Je me rappelle être allé dans un collège à Grigny où j’ai essayé de leur parler de la Saint-Barthélemy, ils ne savaient pas ce que c’était. Je ne sais pas ce qu’ils apprennent. En tout cas, pas à relativiser la place de Dieu dans la société ! Et ce n’est pas simplement le rôle de l’école : les parents, mais aussi les artistes, les intellectuels, les médias devraient faire front pour résister à la tendance des religions à retrouver une place dominante dans la société civile. »
Procès de Charlie Hebdo : « Les menaces envers le journal n’ont pas disparu » déclare Riss : https://www.lefigaro.fr/culture/proces-de-charlie-hebdo-les-menaces-envers-le-journal-n-ont-pas-disparu-declare-riss-20220915
« Des » religions ? Riss reconnaît que « l’enjeu avec l’islam est de savoir s’il va être capable un jour de s’intégrer pacifiquement à nos démocraties, comme les autres religions l’ont fait ». Selon lui, « on en a encore pour un siècle », mais « il ne faut pas désespérer, sinon on ne fait plus rien ». Il continue donc à se battre, à parler avec ces jeunes pour les faire « sortir de leur bulle familiale et culturelle ». Et à vivre, en cherchant « le bon curseur entre prudence et paranoïa » pour ne pas se laisser submerger par les menaces de mort qui pèsent toujours sur lui.
* 13 Novembre - Chroniques d’un procès, de Sylvie Caster, Les Échappés, 352 p., 20 €.