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France : Dora Moutot : « On ne peut effacer le sexe au profit de l’identité de genre »

mercredi 19 octobre 2022, par siawi3

Source :https://www.lefigaro.fr/vox/societe/dora-moutot-on-ne-peut-effacer-le-sexe-au-profit-de-l-identite-de-genre-20221018

Par Ronan Planchon

Publié hier 18 Oct 2022, à 18:57, Mis à jour hier à 19:04


Dora Moutot : « On ne peut effacer le sexe au profit de l’identité de genre »

ENTRETIEN - Invitée du talk-show de Léa Salamé sur France 2 le 15 octobre, la militante féministe est depuis la cible d’invectives pour s’être opposée à la rhétorique de Marie Cau, première maire transgenre de France. Selon Dora Moutot, les transactivistes nient la différence entre être biologiquement une femme et le fait de s’identifier femme.

Ancienne rédactrice en chef de Konbini et créatrice de « T’as joui ? », un blog et compte Instagram dédié à la sexualité, Dora Moutot a notamment publié Mâle Baisées (2021, éd. Guy Trédaniel, 440 p., 21,90€).

LE FIGARO. - Vous avez été critiquée par des militantes néoféministes en vous en opposant à la rhétorique de Marie Cau, première maire transgenre de France, samedi 15 octobre sur le plateau de l’émission « Quelle époque ! » sur France 2. « Pour moi Marie Cau c’est un homme. Un homme transféminin. C’est une personne qui est biologiquement un mâle sauf que cette personne a des goûts qui correspondent à ce qu’on appelle le genre femme », avez-vous dit. Qu’entendez-vous par là ?

Dora MOUTOT. - Selon moi, il existe une différence entre le genre et le sexe. Le genre est une construction sociale. Une femme, de sexe femelle, possède un système reproductif féminin, c’est physiquement une femme, mais on pourrait dire qu’elle est du genre femme parce que, par exemple, elle utilise un vestiaire qu’on qualifie de féminin et se représente dans la société d’une certaine façon.

Ce que j’appelle le « genre femme », c’est in fine cette construction sociale, c’est-à-dire le cliché de ce que serait une femme en société. Aujourd’hui, les transactivistes disent qu’il existe une différence entre le genre et le sexe, chose à laquelle je crois, mais aussi qu’on pourrait effacer le sexe au profit de l’identité de genre.

Je m’oppose à cette théorie. Pourtant, le langage est progressivement en train de la suivre. Il y a quelques années encore, l’utilisation des pronoms « il » et « elle » correspondait au sexe. Aujourd’hui, dans les documents administratifs, on ne vous demande pas quel est votre sexe mais la façon dont vous vous représentez en société : le genre. Il y a une confusion entre le fait de s’identifier en tant que femme dans la société et le fait d’être biologiquement une femme.

Les transactivistes et autres militantes néoféministes estiment qu’à travers cette formulation, vous vous donnez le droit de trancher sur l’identité d’autrui...

Non. Selon moi, n’importe qui a le droit de se vêtir comme il le souhaite, de se représenter dans la société comme il le souhaite. Par contre, modifier les lois et le langage pose de nombreux problèmes. Marie Cau, maire de Tilloy-lez-Marchiennes, peut si elle le souhaite porter une jupe ou du maquillage. Je n’y vois aucun problème. Au contraire, j’invite tous les hommes à se libérer de leur vestiaire qui est relativement restrictif comparé aux femmes qui, elles, se sont battues pour pouvoir porter des pantalons, etc. Mon combat n’est pas celui-là, je milite tout simplement pour que les termes « homme » et « femme » restent connectés à la sexuation des individus et non à cette notion d’identité de genre.

Marie Cau peut avoir la personnalité qu’elle veut, les goûts qu’elle veut, mais les lois et la sémantique, elles, ne devraient pas être modifiées. Si on les modifie, on bascule dans une société selon laquelle on qualifie les individus en fonction de leur identité de genre et non de leur sexe, avec tous les stéréotypes qui y sont associés. Dans ce cas, lorsque je ne joue pas le jeu de la féminité dans l’espace public, suis-je moi-même une femme ?

« Les femmes connaissent mal leur corps parce qu’elles ont évacué la question de la fertilité » : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/les-femmes-connaissent-mal-leur-corps-parce-qu-elles-ont-evacue-la-question-de-la-fertilite-20220817

Par ailleurs, lorsqu’on remplace le sexe par la notion d’identité de genre, que l’on classe les gens en fonction de celle-ci, on part du principe qu’un homme qui se genre en tant que femme peut concourir dans une compétition sportive de femmes. Or cette personne n’a pas la même constitution biologique. Cela pose un problème d’équité sportive.

La romancière J. K. Rowling, créatrice d’Harry Potter, est également très critiquée pour avoir déclaré que les hommes et les femmes sont différents. Comment expliquer que notre époque peine à définir ce qu’est une femme ?

Justement, je ne peine pas du tout à le faire et ai du mal à comprendre que l’on se pose la question. Aux États-Unis, le documentaire « What is à women ? », réalisé par le conservateur américain Matt Walsh connaît un vif succès et tourne autour de cette question.

En tant que femme, je trouve même cette question blessante, insultante au regard de l’oppression millénaire subie par les femmes à travers le monde. Quand en Chine, on abandonnait les filles à la naissance, ce n’est pas parce qu’elles étaient de genres féminin, c’est parce qu’elles avaient un sexe féminin. Quand des femmes se font exciser, elles peuvent se définir comme « non binaires » ou comme « hommes », elles n’y échapperont pas car elles sont de sexe féminin.

La traite des femmes, l’esclavagisme, c’est aussi parce que nous sommes des femmes, de sexe féminin, et pour moi toute la lutte féministe découle de ce fait. Ce n’est pas parce que l’on va effacer du vocabulaire la notion de sexe que les femmes ne vont plus subir d’oppression.

Depuis la diffusion de cette émission, vous avez reçu des insultes sur les réseaux sociaux et avez été assimilée à l’extrême droite. Pour Marie Cau, votre discours se rapproche d’ailleurs de celui de « la fachosphère ». Comment expliquez-vous que la liberté d’expression soit si difficile à ce sujet ?

Sur ce plateau, j’ai ressenti une profonde misogynie de la part de plusieurs hommes qui sont venus m’expliquer ce que c’est que d’être une femme, ce que c’est le mouvement féministe et à quel point je lui portais préjudice. Partout dans le monde, des femmes commeJ.K. Rowling, la militante canadienne Meghan Murphy, Marguerite Stern en France, et des dizaines d’autres, sommes sommées de nous taire, nous sommes traitées de « facho » parce que nous aussi avons un avis et une expérience de vie et corporelle sur ce qu’est une femme. Par ailleurs, nous sommes constamment harcelées sur les réseaux sociaux mais comme nous sommes perçues comme le mal incarné, nous ne pouvons être des victimes de quoi que ce soit.

Je n’ai rien contre la notion de « ressenti ». Mais il y a des réalités biologiques qui, jusqu’à preuve du contraire, existent encore. Un homme et une femme ont des chromosomes différents, leur musculature est différente, etc. On pourrait même considérer que la volonté de certains militants de nous faire taire est une nouvelle forme de patriarcat.

Comment aider les personnes, notamment les adolescents, qui ressentent un désarroi profond quant à l’établissement de leur identité ?

Il faut accompagner ces personnes-là et pousser à les faire réfléchir à ce qu’ils entendent par « homme » ou « femme », il faut les accompagner pour se libérer des stéréotypes de genre qui les enferment. Quand on écoute le discours de Marie Cau, on entend un homme qui a décidé d’effectuer une transition car il n’était pas à l’aise dans son dans le rôle dans lequel la société l’a enfermé. Mais pourquoi ne pourrait-on pas être un homme en ayant des goûts dits très féminins ? Pourquoi, par exemple, ne peut-on pas imaginer qu’un homme qui travaille dans la finance puisse porter en jupe tout en étant accepté des autres ? Il faut, justement, sortir de cette notion de genre et casser les stéréotypes de genre. C’est comme cela que les gens qui ressentent un désarroi profond quant à l’établissement de leur identité seront plus libres.

Il faut dire à ces adolescents que s’ils ne correspondent pas parfaitement aux stéréotypes attribués à un homme ou une femme, ce n’est pas grave, qu’ils ne sont pas nés dans le mauvais corps pour autant mais que la société essaye actuellement de leur faire croire cela pour qu’ils se conforment et qu’ils n’ont pas forcément besoin d’effectuer une transition.

Car il ne faut pas être naïf, les solutions chirurgicales apportées aujourd’hui par l’industrie pharmaceutique, via des bloqueurs de puberté notamment, sont lourdes et sont avant tout un business. Aux États-Unis notamment, il existe une vraie économie de la transition. Des entreprises organisent des levées de fonds pour les entreprises qui se mettent à faire de la distribution de d’hormones de transition aux États-Unis. Ces derniers mois, deux entreprises Folx et Plume, ont respectivement ces derniers mois, 24.000.000 et 25.000.000 de dollars. Et certains laboratoires pharmaceutiques américains comme Gilead, versent des millions à des associations qui font la promotion de l’identité de genre. Ces firmes ont tout intérêt à diffuser la notion d’identité de genre dans la société pour leur business, et de créer un besoin qui n’existait pas par le passé.