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En Écosse, un projet de réforme qui institutionnalise « le genre » sacrifie le droit à des espaces sûrs au profit de l’inclusion. Ces plans malavisés doivent être repensés pour protéger les femmes.
mardi 25 octobre 2022, par
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En Écosse, un projet de réforme qui institutionnalise « le genre » sacrifie le droit à des espaces sûrs au profit de l’inclusion. Ces plans malavisés doivent être repensés pour protéger les femmes.
TRADFEM
23.10.22
Une chronique de Gillian Bowditch, datée du 23 octobre dans The Times
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En discutant récemment avec un groupe d’ami-es – toustes parents de filles – la conversation a porté sur les aspirations pour la carrière de nos enfants. Les pères voulaient seulement qu’elles soient heureuses. Les mères étaient beaucoup plus ambitieuses au nom de leurs filles.
La mère autoritaire est un stéréotype éculé. Mais son invention même est un mot de code servant à dénoncer le désir généralisé des femmes de protéger leurs droits durement acquis. Lorsque les mères pensent à la carrière de leurs filles, c’est dans le contexte des restrictions professionnelles qui leur ont été imposées à elles-mêmes, à leurs mères et à leurs grands-mères.
La génération actuelle qui commence sa carrière devrait, en théorie, bénéficier d’un terrain de jeu uniforme. Mais l’écart d’autorité entre les sexes et l’écart entre les sexes au sein de l’entreprise, sans parler des contraintes biologiques liées au fait de porter des enfants et de s’en occuper, font qu’il s’agit toujours d’une pente ardue à gravir.
Cela ne veut pas dire que les hommes sont pour autant à la fête. Et il faut reconnaître que les obstacles pour les femmes issues de groupes minoritaires sont considérablement plus élevés. Mais dans le fracas du projet de Loi de réforme de la reconnaissance du genre (qui vient d’être déposé en Écosse), la volonté de protection que de nombreuses femmes ressentent à l’égard de leurs droits n’a pas été reconnue à sa juste valeur.
Le projet de loi devrait être adopté lors de son premier vote à Holyrood (siège du gouvernement écossais) la semaine prochaine. Il est soutenu par le Scottish National Party, les travaillistes, les libéraux démocrates et les Verts. Il vise à faciliter le changement légal de sexe des personnes transgenres en supprimant la nécessité d’obtenir l’aval d’un médecin pour l’obtention d’un certificat de reconnaissance de sexe.
Cela signifie que les personnes peuvent s’autoidentifier comme étant de leur genre préféré par le biais d’une déclaration statutaire, sans avoir besoin d’une intervention médicale ou d’une consultation psychiatrique. En outre, il abaissera l’âge auquel les personnes peuvent légalement changer de sexe de 18 à 16 ans.
Les partisans du projet de loi, dont la première ministre Nicola Sturgeon, affirment qu’il simplifiera et améliorera le processus actuel, selon lequel les personnes transgenres doivent d’abord vivre dans leur genre choisi pendant deux ans et subir une évaluation médicale.
À l’avenir, les personnes pourront effectuer une transition sans avoir à fournir de preuve médicale de dysphorie de genre si elles vivent dans leur genre acquis depuis seulement trois mois.
Mais pour un projet de loi présenté comme un simple toilettage des pratiques actuelles, le vitriol qui l’entoure est sans précédent à Holyrood.
Des femmes ont manifesté devant le Parlement. L’écrivaine célèbre JK Rowling a pris position en faveur des femmes qui considèrent le projet de loi comme un coup porté aux droits des femmes, et a endossé un T-shirt portant le slogan « Nicola Sturgeon : destructrice des droits des femmes » en soutien aux manifestantes réunies devant Holyrood. Dans le Sunday Times de la semaine dernière, Rowling a déclaré : « Si une femme ou une jeune fille est victime de voyeurisme, de harcèlement sexuel, d’agression ou de viol en raison des nouvelles règles laxistes du gouvernement écossais, la faute en reviendra entièrement à celles et ceux qui, à Holyrood, ont ignoré les spécialistes en matière de protection et les militantes. »
Les opposant-es au projet de loi par crainte que, selon les termes de Rowling, des « mâles intacts » obtiennent le droit de se trouver dans des espaces réservés aux femmes tels que « les salles de bains publiques, les vestiaires, les centres d’aide aux victimes de viol, les refuges contre la violence conjugale, les salles d’hôpital et les cellules de prison qui étaient jusqu’à présent réservé-es aux femmes », ont été vilipendés et dans certains cas privés de leur droit de parole.
Pourtant, les sondages suggèrent qu’ils parlent au nom de la majorité. Selon un sondage réalisé pour le Sunday Times, seuls 26 % des électeurs du SNP sont favorables à l’abaissement de l’âge de 18 à 16 ans, 52 % étant contre. Le chiffre est encore plus bas pour les électeurs travaillistes, avec 24 % en faveur et 61 % contre. La réduction du temps d’attente pour la reconnaissance légale de deux ans à trois mois est soutenue par moins d’un tiers des électeurs du SNP. Parmi les jeunes de 16 à 34 ans, seuls 32 % sont favorables à la réduction de l’âge, 50 % y étant opposés.
Compte tenu des inquiétudes au sujet des organisations qui conseillent les jeunes transgenres et des informations selon lesquelles les députés craignent un retour de bâton sur les médias sociaux s’ils s’expriment, il est temps de repenser la question. À tout le moins, les préoccupations des femmes, de l’électorat et d’organismes tels que le Scottish Council on Human Bioethics méritent d’être davantage prises en compte qu’elles ne l’ont été jusqu’à présent.
Le souci de sauvegarder les droits des femmes ne rend personne « transphobe ». Mais le droit des femmes à des espaces sûrs, une fois perdu, sera presque impossible à rétablir.
Dans la clinique de cancérologie gynécologique d’un hôpital de Glasgow, les deux toilettes – auparavant une féminine et une masculine – sont désormais neutres. Les femmes qui ont subi les examens et les opérations les plus intimes doivent maintenant changer de vêtements, prendre des médicaments ou faire face à leurs émotions en sachant qu’elles ne sont plus dans un espace réservé aux femmes. Quelle personne ayant le moindrement de cœur approuverait cela ?
Les droits que les femmes protègent sont les droits pour lesquels leurs mères, leurs grands-mères et leurs arrière-grands-mères se sont battues. Elles les protègent non pas pour elles-mêmes, mais pour leurs filles, leurs petites-filles et leurs arrière-petites-filles.
Il semblait autrefois que ces droits étaient inattaquables, mais nous vivons à une époque où ce n’est plus le cas. Le langage a été subverti, les femmes ont été déshumanisées, les principes scientifiques ont été mis à la poubelle et l’empirisme a été sacrifié dans une tentative malavisée d’inclusion de n’importe qui. Si Madame Sturgeon ne veut pas écouter les manifestantes, elle devrait au moins écouter ses propres électrices et électeurs. Que ce projet de loi soit considéré comme une priorité de Holyrood alors que la vie et les moyens de subsistance des gens sont menacés est déconcertant. Il y a suffisamment d’inquiétudes parmi des groupes disparates pour justifier un sursis à la mise en oeuvre de ce projet de loi.
VERSION ORIGINALE : https://www.thetimes.co.uk/article/7cfd5080-5232-11ed-bb65-87f2b7644902?shareToken=faa9ba1d2eb8e41d55c02089afa05e07
Traduction : TRADFEM