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Iran-France : Isabelle Adjani, cheveux au vent et parole libre

mardi 8 novembre 2022, par siawi3

Source : https://charliehebdo.fr/2022/11/international/isabelle-adjani-cheveux-au-vent-et-parole-libre/?utm_source=sendinblue&utm_campaign=NEWSLETTER%20QUOTIDIENNE%20-%20LARTICLE%20WEB%20-%20071122%20-%20NON%20ABONNES&utm_medium=email

Isabelle Adjani, cheveux au vent et parole libre

Natacha Devanda ·

Mis en ligne le 7 novembre 2022

En France, la révolte féministe iranienne pourrait être soutenue par les femmes voilées qui pourraient le retirer par solidarité, estime l’actrice au micro de France Info. De quoi déclencher une nième polémique sur le thème : « Et le droit des femmes à faire ce qu’elles veulent alors ? » En oubliant justement que lorsqu’un pays est sous le joug des religieux, le droit de faire ce qu’on veut n’existe plus.

Isabelle Adjani est à l’affiche de Mascarade, le nouveau film de Nicolas Bedos. Mais ce n’est pas pour cette raison qu’elle agite – un peu – les réseaux sociaux aujourd’hui. Interviewée sur France Info ce lundi 7 novembre, elle a répondu à la question d’une journaliste sur ses derniers engagements. À savoir, un coup de ciseaux dans sa chevelure en guise de soutien aux Iraniennes qui n’en peuvent plus de vivre enfermées sous leur voile et privées de toute liberté. Une révolte survenue en réaction à la mort de Mahsa Amini, une étudiante de 22 ans arrêtée par la police des mœurs pour une mèche de cheveux qui dépassait de son voile puis tuée par les gardiens de la révolution islamique. « Ce n’est pas nous qui allons changer la politique des mollahs et les ramener à la raison humaine », explique l’actrice qui considère les vidéos des femmes iraniennes comme un appel mondial qu’il « n’est pas question de ne pas entendre. Ce que nous avons fait, c’est simplement envoyer un message qui peut leur apporter un peu de force dans un combat qui dépasse l’entendement du courage » (sic).

On s’est un peu moqué ici du happening d’une tripotée d’actrices françaises se faisant une coupe symbolique de quelques boucles blondes, brunes ou rousses.

Mais Isabelle Adjani combat à sa manière l’obscurantisme religieux et le sexisme. Jusque dans des rôles controversés, comme celui où elle interprétait une prof de lettres à bout de nerfs dans La journée de la jupe. Son personnage en équilibre précaire dénonçait alors le machisme et le sexisme des caïds des quartiers difficiles.

Car il faut reconnaître à Adjani de la suite dans les idées, lorsque poursuivant son ressenti sur l’actualité en Iran, elle explique que cette révolte féministe lui « donne envie d’attendre des femmes qui portent le voile de l’enlever par solidarité ». Quoi  ? Mais comment ose-t-elle  ? Un indigent pureplayer intitulé Oh my mag  ! se plaît à faire monter la mayonnaise et joue les offusqués avec cette phrase sibylline : « Alors là, on n’a pas trop compris », suivi d’une émoticône tout en panique. Pas compris ou fait semblant de ne pas comprendre  ?

Quant aux réseaux sociaux, ça pépie un peu chez l’oiseau bleu. Pas trop non plus, car Adjani n’est pas la dernière influenceuse à la mode. C’est du 50–50 la balle au centre entre ceux qui trouvent qu’elle a raison et ceux – plus énervés souvent – qui estiment qu’elle ferait mieux de s’intéresser à son botox. Pourtant, son idée n’est pas une exclusivité. Le 31 octobre dernier, les propos de Leïla Lesbet, membre de l’Association québécoise des Nord-Africains pour la laïcité (AQNAL), étaient déjà repartagés sur Twitter : « Souvenons-nous de ces femmes voilées en Europe qui sensibilisaient les femmes occidentales à participer au World Hijab Day pour expliquer « leur choix ». Des Occidentales ont accepté de le porter symboliquement durant une journée. Le voile islamique triomphait grâce à cette solidarité pervertie, répondant à l’injonction de visibiliser l’islam politique. Espérerions-nous la même solidarité de la part des femmes voilées : qu’elles retirent leur voile le temps d’une journée voire une heure pour dire à leurs sœurs iraniennes musulmanes que l’islam n’a jamais appelé à l’emprisonnement, au viol et au meurtre pour non-port du voile (…) ».

Peu de réactions à ses écrits, quand Isabelle Adjani a droit, elle, aux comparaisons les plus faciles. « J’appelle tout ceux qui mangent à cesser de le faire par solidarité avec ceux qui meurt de faim. Fatigue » (sic), ou comble de la bêtise : « Dans un pays, on impose aux femmes de le porter et dans un autre, on va bientôt leur imposer de l’enlever. Et le choix des femmes dans tout ça  ? ». On vous épargne d’autres tweets du même tonneau…

Des défenses qui, sous couvert de bons sentiments et d’esprit d’ouverture, nient la réalité de ce que vivent les femmes – et les hommes – en Iran et dans d’autres pays où règne la charia. C’est qu’on rigole rarement sous la loi islamiste. Sauf, en ce moment en Iran où, garçons et filles rivalisent de malice. Il est jouissif de regarder leurs vidéos. On les voit sautiller dans la rue derrière un mollah portant turban et d’une légère calotte le décoiffer avant de prendre la fuite.

Bien plus impertinent et dangereux que les croa-croa poussés dans les années 1950 par les anarchistes au passage des curés en soutanes noires qui supportaient la comparaison avec des corbeaux. À l’époque, en France, le clergé catholique avait tendance à vouloir imposer ses règles à l’ensemble de la société française. On ne criait pas pour autant à la cathophobie. Et la gauche d’alors luttait ensemble et unie contre l’obscurantisme religieux.

Au moment où la jeunesse iranienne est en train de vivre ce qui ressemble à un Mai 68 à l’orientale : une folle envie de libération des mœurs, des revendications pour manger dans la cantine des filles, pour que ce qui se pratique en privé chez une jeunesse cultivée et estudiantine s’affiche aussi dans la rue, Isabelle Adjani, et d’autres avec elle, pensent que des femmes voilées qui vivent en France et qui, rappelons-le, peuvent bénéficier de toutes ces libertés, auraient pu se montrer solidaires de cette révolte féministe et, par un geste fort, retirer leur voile. Utopistes va  ! Car, aucun mouvement spontané n’est venu, ni ne viendra des femmes voilées occidentales. La preuve s’il en fallait une que le voile est bien plus qu’un vêtement. •