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Comment l’Occident a abandonné Snowden à Poutine
vendredi 25 novembre 2022, par
Comment l’Occident a abandonné Snowden à Poutine
Bons baisers de Russie
Par Jack Dion
Publié le 27/09/2022 à 12:30
Réfugié à Moscou après ses révélations sur l’espionnage américain, l’ex-fonctionnaire de la CIA a obtenu la nationalité russe. Aucun des pays où il a demandé l’asile politique n’a daigné lui tendre la main.
Vladimir Poutine a décidé d’accorder la nationalité russe au lanceur d’alerte américain Edward Snowden, ancien employé de la NSA américaine. Ce dernier est réfugié à Moscou depuis 2013. C’est à cette époque qu’il a dû fuir les États-Unis après avoir fourni à la presse des milliers de documents prouvant l’ampleur de l’espionnage électronique exercé par Washington dans le monde, y compris dans des pays présumés alliés de la superpuissance.
En ces temps d’invasion de l’Ukraine, le président russe espère sans doute se refaire une virginité perdue en donnant une leçon aux USA sur un terrain où on ne l’attend pas, celui de la défense des droits de l’homme. C’est de bonne guerre. Mais Edward Snowden risque au passage de se voir considéré a posteriori comme un agent de Moscou, alors qu’il se retrouve dans l’ex-capitale des Soviets faute de mieux, abandonné par tous les pays occidentaux où il a demandé l’asile politique en vain, car il n’est pas facile de s’opposer aux États-Unis.
Macron aux abonnés absents
Parmi ces pays, il y a la France. Mais l’Élysée ne s’est pas plus mobilisé en sa faveur que pour le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange. Interrogé sur France Inter en 2019, Edward Snowden avait lancé : « J’aimerais bien qu’Emmanuel Macron m’invite. » Mais le Président de la République préfère inviter des influenceurs. Entre McFly et Carlito d’un côté et Snowden de l’autre, il n’y a pas photo.
L’affaire qui porte son nom a commencé il y a près de dix ans quand cet employé des services américains a apporté sa pierre aux révélations qui valent à Julian Assange d’être derrière les barreaux en Grande-Bretagne, sous la menace d’une extradition vers les États-Unis, où il est sous la menace d’un emprisonnement à vie pour cause d’espionnage – rien que ça. En l’occurrence, Edward Snowden a révélé qu’en matière d’espionnage, les Américains n’ont de leçon à recevoir de personne, vu qu’ils le pratiquent avec une extrême sophistication, en n’oubliant personne.
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Du jour au lendemain, le jeune analyste, alors âgé de 30 ans, a été considéré comme un traître. Il a été obligé de rentrer en clandestinité et de fuir vers l’étranger dans des conditions dignes d’un film hollywoodien. Il s’est d’abord caché à Hong Kong avant de partir pour Moscou, alors que rien ne le prédestinait à un tel voyage. C’était ça ou l’arrestation et l’assurance de subir le même sort que Julian Assange.
Lanceur d’alerte oublié
Une fois installé en Russie, Snowden a demandé, comme Assange, l’asile politique à différents pays européens. Pour toute réponse, il n’a eu que le bruit de la porte que l’on claque au nez de l’impétrant, tout en dissertant à foison sur les droits de l’homme, les valeurs humanistes, l’État de droit et autres plaisanteries destinées à masquer l’alignement systématique sur Washington.
Se dire solidaire des lanceurs d’alerte oui, bien sûr, pas de problème, ça ne mange pas de pain. Mais tendre la main pour aider quelqu’un qui a levé le voile sur des abus de pouvoir et des pratiques condamnables, pas question.
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Près de dix ans plus tard, Edward Snowden est toujours à Moscou, d’où il fait entendre sa voix via les réseaux sociaux. Entre-temps, il a épousé Lindsay Mills, en 2017, avec qui il a eu deux fils. En 2020, à la naissance du premier, il a expliqué qu’il demandait la nationalité russe pour pouvoir réunir sa famille. Sa femme a effectué la même démarche. Snowden a précisé : « Lindsay et moi resterons américains », ajoutant même : « en élevant notre fils avec toutes les valeurs de l’Amérique que nous aimons, y compris la liberté de dire ce que l’on pense ». Vu de Moscou, cela ne manque pas de piquant.
Edward Snowden a même lancé un dernier appel en affirmant : « J’attends avec impatience le jour où je pourrai retourner aux États-Unis pour que toute la famille puisse être réunie. » Même s’il conserve toujours la nationalité américaine, le lanceur d’alerte risque d’attendre longtemps. En effet, le porte-parole du Département d’État américain, Ned Price, a déclaré : « M. Snowden devrait rentrer aux États-Unis et y faire face à la justice comme n’importe quel autre citoyen américain. » Autant lui demander de se jeter dans la gueule du loup.
Par Jack Dion