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France : Le film “Nos frangins” alimente le débat sur les violences policières à contenu raciste qui persistent en France
mercredi 21 décembre 2022, par
inspiré des morts de Malik Oussekine et de Abdel Benyahia, tués par des policiers dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986
Le film “Nos frangins” alimente le débat sur les violences policières à contenu raciste qui persistent en France
publié le 18 décembre 2022 (modifié le 21 décembre 2022)
Contenu
Le film “Nos frangins” est inspiré de la mort de Malik Oussekine et de Abdel Benyahia, tués tous deux par des policiers dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986. L’étudiant Malik Oussekine a été victime, lors d’une manifestation contre le projet de réforme Devaquet à laquelle il ne participait pas, du peloton de « voltigeurs motocyclistes » mis en place par le ministre de l’Intérieur Charles Pasqua et sa mort a suscité une indignation dont la mémoire collective garde le souvenir. Mais celle d’un autre jeune Français d’origine algérienne, Abdel Benyahia, tué la même nuit par un officier de police ivre, à Pantin, alors qu’il tentait de s’interposer dans une bagarre, est moins connue. A partir de ces deux drames, le film suscite le débat sur les violences policières, souvent à contenu raciste, qui continuent à être commises et sur l’absence de toute autorité indépendante de la hiérarchie policière pour enquêter sur ces faits.
Réalisation : Rachid Bouchareb. Durée : 1h32 Distribution : Le Pacte
Nos frangins Bande-annonce VF
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La Ligue des droits de l’Homme soutient “Nos Frangins”,
un film de Rachid Bouchareb
publié sur le site de la LDH, le 15 décembre 2022.
Source
La mort de Malik Oussekine, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, suite à des violences policières lors d’une manifestation contre le projet de réforme Devaquet (à laquelle Malik ne participait pourtant pas) fait partie de notre mémoire collective. Moins de personnes savent qu’au cours de la même nuit, un autre jeune Français d’origine algérienne, Abdel Benyahia, était tué par un officier de police ivre, à Pantin. Nos frangins est un hommage puissant à ces deux jeunes gens.
Rachid Bouchareb, que le grand public connaît surtout pour son film “Indigènes”, a mené, avec sa coscénariste Kaouther Adimi, un travail de recherche approfondi sur ces deux affaires : plongée dans les archives, entretiens avec des membres des deux familles. De ces rencontres, ils ont imaginé des éléments de fiction qui se mêlent dans une dynamique remarquable aux images d’archives. Et ils ont relié les deux affaires en créant deux personnages tout à fait plausibles : un inspecteur de l’IGS [l’Inspection générale des services] censé enquêter sur ces deux meurtres et un employé de l’institut médico-légal, un Africain, qui accueille les deux corps avec une douceur infinie, en leur parlant et en chantant en bambara.
Fiction inspirée de faits réels, les images d’archives nous font revivre intensément les événements de ces quelques jours : manifestations des étudiants, répression de la police, interventions des voltigeurs, déclarations du pouvoir en place qui cherche à étouffer/déguiser l’affaire Oussekine (il ne dit rien de la mort d’Abdel), témoignages divers, dont celui de Maître Kiejman, avocat de la famille de Malik, celui d’un témoin de la scène de matraquage… et la colère, l’indignation de toute la population, jusqu’à la marche silencieuse en l’honneur des deux jeunes gens le 10 décembre.
En regard, la douleur immense et les réactions, très différentes, des deux familles. Celle de Malik, représentée par son frère aîné et sa sœur, se bat de toutes ses forces contre ce que veut faire croire la police et mène sa propre enquête. Le père d’Abdel, lui, fait profil bas : on lui cache la mort de son fils et il accepte, sans rien dire, les bobards des policiers, refusant de croire son autre fils qui lui assure qu’ils mentent. Contrairement au frère de Malik, jeune entrepreneur, il appartient à une génération d’immigrés qui se fait la plus invisible possible.
L’IGS, un organisme qui appartient à l’institution policière
Entre les deux, cet inspecteur de l’IGS, visiblement très mal à l’aise vis à vis des consignes qu’il reçoit et qui tente de trouver la vérité.
Des images de Malik, chez lui, au club de jazz où il était ce soir-là et dans la rue avant la terrible rencontre, contribuent à rendre ce film encore plus émouvant.
Pour incarner les principaux personnages, d’excellents acteurs, qui les font vivre avec intensité et vérité : Reda Kateb et Lyna Khoudri sont le frère et la sœur de Malik, Samir Guesmi le père d’Abdel, et Raphaël Personnaz l’inspecteur de l’IGS.
La musique du talentueux compositeur Amine Bouhafa (à qui l’on doit, entre autres, celle de “Tumbuktu”, “Gagarine”, “Le Sommet des dieux”) accompagnent admirablement certains passages du film, qui vibre aussi avec des chansons de Mano Negra, Rita Mitsouko, Warda, et celle de Renaud, “Petite”, qui fait allusion aux deux jeunes gens et clôt le film avec beaucoup d’émotion.
Dans une interview accordée à Charles Tesson, critique et historien du cinéma, Rachid Bouchareb reconnaît que les violences policières lors du mouvement des Gilets Jaunes ont contribué à renforcer l’idée de faire ce film : « On est encore dans cette actualité. Sur le sujet de l’immigration et des violences, on y est encore. On pense tout le temps qu’on va passer à une autre étape, mais il n’y a pas vraiment de changement. Cela fait 35 ans. Faut-il plus de temps pour résoudre certains problèmes ? »
Un film recommandé par le MRAP, la LDH, SOS Racisme, Amnesty International et la LICRA
Quelques-unes des projections organisées
par la Ligue des droits de l’Homme
A Guéret, le jeudi 15 décembre à 18h, au cinéma Le Sénéchal.
A Roanne, le jeudi 15 décembre à 18h, au cinéma Le Renoir.
A Saint Yrieix la Perche, le mardi 10 janvier à 20h30, au cinéma Arévi.
Quelques-unes des projections organisées
par le MRAP
A Saint-Denis, le 12 novembre à 20h30, au cinéma l’Écran.
A Metz, le 24 novembre à 20h, au Klub Metz.
A Paris, le 1er décembre à 20h, au cinéma les 7 Parnassiens.
A Aubenas, le 7 décembre à 18h, au cinéma Le Navire.
A Pantin, le 8 décembre à 19h30, au cinéma 104.
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Les actualités de l’époqueici 37:40
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Un débat autour de ce film
• Abdel pour mémoire, réalisé par Mogniss H. Abdallah, petit film de 20 minutes monté en 1988, retrace le combat de la famille d’Abdel Benyahia, soutenue par le collectif « Justice pour Abdel », pour obtenir une condamnation du policier meurtrier. Il a été montré le 2 décembre 2022 au cinéma L’Etoile à La Courneuve avant la projection en avant-première du film Nos frangins. Sous l’impulsion de Malika Benyahia, la nièce d’Abdel, Nos frangins a été projeté en « travaillant sur l’esprit critique, en l’englobant dans les faits réels », a-t-elle expliqué. La famille d’Abdel Benyahia a souhaité à cette occasion rétablir certains faits. Une demande est partie de la salle : projeter le film Pour Abdel avant chaque projection de Nos frangins.
• Lionel Lemonier, « Nos frangins, l’hommage cinématographique contesté rendu à Malik Oussekine et Abdel Benyahia », sur Saphirnews.
• Michel Kokoreff, « Fiction ou imposture ? – sur Nos frangins de Rachid Bouchareb », sur AOC. Qui site les travaux suivants :
• Michel Kokoreff, Violences policières, une généalogie d’une violence d’État, Paris, Textuel, 2020.
• David Dufresne, Maintien de l’ordre, Paris, Hachette, 2007.
• Mogniss H. Abdallah, Rengainez, on arrive ! Chroniques des luttes contre les crimes racistes ou sécuritaires, contre la Hagra policière et judiciaire des années 1970 à nos jours, Paris, Libertalia, 2012.
• Dominique Manotti, Marseille 73, Paris, Équinox les Arènes, 2020.
• Yvan Gastaut, « La flambée raciste de 1973 », Revue européenne des migrations internationales, Vol 9, n°2, 1993.
• Maurice Rajsfus, 1953, un 14 juillet sanglant, Paris, Editions du détour, 2022.
• Emmanuel Blanchard, « La Goutte d’or, 30 juillet 1955 : une émeute au cœur de la métropole coloniale », Actes de la recherche en sciences sociales, n°195, 2012/5.
• Jean-Luc Einaudi, La bataille de Paris. 17 octobre 1961, Paris, Seuil, 1991.