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En Iran, la terreur ne vient pas à bout de la révolte

jeudi 22 décembre 2022, par siawi3

Source : https://www.ouest-france.fr/monde/iran/iran-la-terreur-ne-vient-pas-a-bout-de-la-revolte-630cb26c-8066-11ed-8d6b-ddbeef6513c1

En Iran, la terreur ne vient pas à bout de la révolte

Cela fait trois mois que la mort en détention de la jeune Mahsa Amini, pour un voile mal porté, a enclenché un impressionnant mouvement de révolte contre le régime des mollahs en Iran. La répression de plus en plus féroce a vidé les rues mais les protestations persistent sous d’autres formes. Le bras de fer s’annonce long.

Photo : L’actrice Taraneh Alidoosti, figure du cinéma iranien, a été arrêtée pour son soutien public au mouvement de contestation et pour avoir protesté contre les condamnations à mort de manifestants. | ARCHIVES JULIE SEBADELHA / AFP

Ouest-France

Patrick ANGEVIN.

Publié le 20/12/2022 à 16h56

Il n’y a plus de manifestations de masse en Iran. Trop risqué, trop dangereux. Trois mois après la mort dans un commissariat de Mahsa Amini, cette Iranienne de 23 ans arrêtée pour un voile islamique « mal porté », une féroce répression a vidé les rues. Mais le régime des mollahs n’est pas parvenu à briser la contestation qui s’adapte et prend d’autres formes.

Chercheurs et ONG ont comptabilisé au moins 500 morts, plus de 18 000 personnes ont été arrêtées, dont des centaines de jeunes de moins de 18 ans, selon Human Rights Activists News Agency (HRANA). Pour avoir manifesté, Mohsen Shekari et Majidreza Rahnavard, âgés de 23 ans, ont été pendus les 8 et 12 décembre. Le second en public, au bout d’une grue… Onze autres condamnés attendent dans le couloir de la mort.

Photo : Majidreza Rahnavard, arrêté à Mashhad le 19 novembre lors d’une manifestation et pendu en public le 12 décembre. | AFP

« Le régime applique une politique de terreur, ciblée et plutôt efficace en tout cas à court terme, explique David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l’Iris, l’Institut de relations internationales et stratégiques (1). ​Dans les régions périphériques du Kurdistan et du Sistan-Baloutchistan, les Gardiens de la Révolution [l’armée idéologique du régime], à qui la répression a été confiée, tirent à la mitrailleuse lourde. La militarisation de la répression dans ces régions est présentée comme une réponse à un supposé complot extérieur instrumentalisant les minorités kurdes et baloutches. »

Faire des exemples

« Dans le reste de l’Iran, poursuit David Rigoulet-Roze. ​C’est aussi épouvantable mais plus ciblée. Des témoignages rapportent l’utilisation de faux ambulanciers pour arrêter les manifestants les plus actifs. Le régime fait aussi la chasse drastique aux activistes sur les réseaux sociaux. Malgré les changements de téléphones et l’utilisation de VPN, les arrestations de jeunes à leur domicile se multiplient. »

Les arrestations de figures connues comme le footballeur Amir Azadani ou plus récemment de l’actrice Taraneh Alidoosti, pour des publications sur Internet, complètent cette volonté de faire des exemples pour intimider la population. « Il semble aussi exister une forme de répression genrée, qui vise les jeunes femmes, considérées dans la logique du régime, comme à l’origine du mouvement de protestation. » ​Dans les prisons, les viols des prisonnières seraient fréquents.

Les forces de sécurité s’épuisent

« Le régime a compris que ce mouvement de contestation qu’il n’avait absolument pas anticipé, s’inscrit dans la durée. Alors il s’est adapté. Il pense pouvoir le contenir et que le temps joue en sa faveur, ce qui n’est pas assuré. Parce que la contestation aussi s’adapte, qu’elle prend de nouvelles formes et qu’elle épuise les forces de répression. »

Photo : Une manifestante brandit un portrait de Mahsa Amini lors d’une manifestation de soutien en octobre à Istanbul (Turquie). | BULENT KILIC / AFP)

Un constat partagé par la Franco-Iranienne Azadeh Kian, professeure de sociologie à l’université Paris-Cité et spécialiste des questions de genre et de l’action politique en Iran. « Réprimer des manifestations qui se déroulent au même endroit, à la même heure, était aisé. Aujourd’hui, les forces de la répression doivent faire face à d’autres formes de mobilisation. » ​On manifeste à l’improviste dans un quartier, parfois à l’échelle d’un immeuble où tout le monde crie : « Mort au dictateur, mort à Khamenei ! » ​Quand les forces de sécurité débarquent, il n’y a personne à arrêter.

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