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Afghanistan. Un professeur déchire ses diplômes en direct à la télévision, en soutien aux étudiantes
vendredi 13 janvier 2023, par
Afghanistan. Un professeur déchire ses diplômes en direct à la télévision, en soutien aux étudiantes
Un professeur afghan a déchiré ses diplômes en direct sur une chaîne de télévision, en protestation à la restriction de l’accès à l’éducation des femmes, en vigueur depuis le 20 décembre 2022. Un extrait relayé par la presse et sur les réseaux sociaux.
Un professeur afghan a déchiré ses diplômes en direct à la télévision sur « Tolo TV » en protestation à la restriction de l’accès à l’éducation des femmes, en décembre 2022. | CAPTURE D’ÉCRAN TWITTER / @ABDULHAQOMERI
Ouest-France
Maxime PONSOT.
Publié le 29/12/2022 à 18h11
Les larmes aux yeux, un professeur a déchiré ses diplômes en direct lors d’une émission de la chaîne afghane Tolo TV, pour afficher son soutien à ses compatriotes féminines, relaie Courrier international ce jeudi 29 décembre 2022. Un geste de contestation envers les atteintes aux libertés des Afghanes, récemment privées d’enseignement supérieur.
Un ancien journaliste de la chaîne, Abdulhaq Omeri, a diffusé mardi sur les réseaux sociaux un extrait – non daté – de la séquence. Extrait durant lequel on voit un homme, présenté comme le professeur Ismail Mashal, dénoncer les dernières mesures des autorités talibanes.
« Aucune place pour l’éducation dans ce pays »
La séquence a d’ailleurs été largement partagée, puis reprise et traduite du dari (aussi appelé persan afghan ou persan oriental) par The Guardian . « Aujourd’hui, j’ai apporté mes diplômes d’enseignant et mon doctorat », livre l’universitaire sur le plateau de la chaîne de télévision, la voix et les mains tremblantes, affirmant qu’il n’en a désormais « plus besoin […] parce qu’il n’y a aucune place pour l’éducation dans ce pays ».
« Si ma sœur et ma mère ne peuvent pas faire d’études, alors je n’accepte pas cet enseignement. Je vais déchirer mes diplômes », poursuit-il au bord des larmes avant de passer à l’acte, face au présentateur.
Les règles des talibans à nouveau très fermes
Pour rappel, le gouvernement taliban d’Afghanistan a interdit l’accès aux études supérieures aux femmes. Une décision annoncée le 20 décembre dernier et appliquée dès le lendemain puisque des gardes armés bloquaient l’entrée des campus universitaires du pays aux étudiantes.
À leur retour au pouvoir en août 2021, les talibans avaient pourtant promis de se montrer plus souples, mais ils sont vite revenus aux règles strictes qui avaient marqué leur premier passage au pouvoir (1996-2001). Les mesures liberticides se sont multipliées, en particulier à l’encontre des femmes, qui ont été progressivement écartées de la vie publique, des emplois et exclues des collèges et lycées.
VIDEO ici.
« Ma mère et mon père ont étudié pendant plus de quinze ans et j’ai pu enseigner dans plusieurs universités pendant quatorze ans. Maintenant, sous le gouvernement de l’émirat islamique, on m’invite à garder le silence », a déclaré Ismail Mashal, qui se serait exprimé après son intervention, selon Courrier international, qui cite The New Arab (version anglophone du site Al-Araby Al-Jadid financé par le Qatar) relayant les informations de l’agence de presse égyptienne Mena. « Mes amis me disent : ‘‘Ne lutte pas, ne t’exprime pas devant la presse, parce qu’il n’y a pas de liberté dans ce pays’’ ».
Des protestations étudiantes
D’autres mouvements de protestation ont eu lieu en Afghanistan. Au moins 48 hommes, professeurs dans différentes universités, à Kaboul et à travers le pays, ont quitté leurs fonctions depuis l’annonce du gouvernement taliban, toujours d’après Mena.
Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent également des actions d’étudiants masculins, que rapporte aussi le tabloïd britannique Metro . Le journaliste Abdulhaq Omeri a par exemple partagé une vidéo dans laquelle on les voit refuser de prendre part à des examens et sortir des salles de cours de l’université Nangarhar sous les applaudissements de leurs camarades femmes.
Au pouvoir depuis la mi-août 2021, les talibans, dont l’autorité n’est pas reconnue par l’essentiel de la communauté internationale, ont aussi ordonné le 24 décembre aux femmes et aux filles de ne plus travailler pour des ONG nationales ou internationales, provoquant l’indignation de nombreux pays et les réactions de plusieurs organisations.