Russie : Pour mieux connaître la lutte de Poutine contre qui ?, contre quoi ?

Source : http://www.fondation-besnard.org/spip.php?article3882

Pour mieux connaître la lutte de Poutine contre qui ?, contre quoi ?

Frank Mintz,

23.02.2023.

Quand il s’agit de la Russie, les médias ont voulu nous transformer en stratèges et en politiciens. Mais pour juger un pays il suffit de savoir combien gagnent les travailleurs par rapport aux prix de la nourriture qu’ils consomment et de voir comment ils organisent leur lutte.

Depuis que Poutine est au pouvoir, en gros vingt ans, les salariés (des jeunes aux retraités) gagnent peu ou de moins en moins et les femmes ont perdu un des bons aspects du marxisme léninisme : la retraite à 55 ans et à 60 pour les hommes.
Depuis 2018, les unes et les autres travaillent cinq ans de plus. Par contre depuis la même année, les femmes sont mieux considérées comme citoyennes puisque la décriminalisation des violences au sein des familles a été adoptée, la formule la plus marquante est « бейте женщин, бейте детей – всё это дозволено frappez les femmes, frappez les enfants : tout cela est permis. »
On renforce ainsi la tradition russe et religieuse du droit des hommes à garantir la vie familiale dans ce pays appelé la Russie.

« Une erreur colossale » a déclaré énergiquement la député Oksana Pouchkina au quotidien russe Metro [https://www.gazetametro.ru/legacy/articles/dekriminalizatsija-poboev-v-rossii-provotsiruet-domashnih-tiranov-15-11-2018].

Après cette précision, je reprends une constatation de 2008 d’un syndiqué d’une entreprise du bâtiment à Omsk dont le directeur à l’époque soviétique est devenu le PDG d’un groupe capitaliste florissant. Dans cette ville les travailleurs de la Sécurité du pouvoir du peuple sont maintenant des policiers de la FSB, la Sécurité de la Fédération de Russie. Et le syndicat du camarade dans le Btp était la SKT, la Confédération syndicale de Sibérie, qui a été « légalement » dissoute parce qu’elle ne répondait pas aux normes de la loi russe sur les syndicats (atteindre le pourcentage minimum d’adhérents par rapport à ceux de la région et avoir un siège assez grand et situé dans un local indépendant de logements individuels, etc.).

Bien entendu tout cela n’avait rien à voir avec les actions plutôt anarchosyndicalistes de la SKT.

Dernière mise au point : depuis plus de dix ans, il existe une série d’assassinats, de violence « spontanée » contre des militants écologistes et de la gauche dite extrême. Poutine a multiplié les interdictions des manifestations des partis critiques de son gouvernement et les arrestations de ses principaux opposants.

La tradition marxiste léniniste des incarcérations, des séjours gratuits en hôpitaux psychiatriques et des « vacances » de quelques années dans des camps de travail peu chauffés en Sibérie, a inculqué dans la population l’habitude de voir et se taire.
C’était exactement la même sous le franquisme, ce fascisme catholique qui a fini par lasser une partie des croyant, un peu violés par de braves curés pédophiles... dénoncés par une campagne de presse en Espagne.

Poutine a gardé avec un grand respect cette tradition en y ajoutant (comme au temps des tzars) l’obéissance de la population à l’obscurantisme de l’église orthodoxe (se rappeler des condamnations subies par les pussy cats, surtout Nadejda Tolokonnikova).

Je ne peux que regretter les jérémiades des médias occidentaux et ukrainiens sur le silence et le manque de manifestation des Russes contre le régime de Poutine. Ces médias occidentaux et ukrainiens sont beaucoup plus discrets sur la corruption qu’ils subissent en s’abstenant de toutes manifestations importantes.
Il n’y en a pas en Russie pour les mêmes raisons qu’il n’y a jamais eu de manifestations de dizaines de milliers de personnes contre Franco en Espagne quand il était au pouvoir (entre 1936 et 1975), ni contre la dictature argentin entre 1976 et 1983, etc.

Et donc je trouve curieux que les mots de Poutine dans son allocution du 21 février 2023 n’aient pas été repris par ses partisans en dehors de la Russie :
« И здесь опять лгут (Элиты Запада) постоянно, извращают исторические
факты, не прекращают нападки на нашу культуру, на Русскую православную церковь, другие традиционные религиозные организации нашей страны. Et une fois de plus, elles mentent constamment (les élites occidentales), elles falsifient les faits historiques, elles n’ont de cesse d’attaquer notre culture, la Russie de l’église orthodoxe et les autres religions traditionnelles de notre pays. Посмотрите, что они делают со своими собственными народами : разрушение семьи, культурной и национальной идентичности, извращения,
издевательства над детьми, вплоть до педофилии, объявляются нормой, нормой их жизни, а священнослужителей, священников принуждают благословлять однополые браки. Voyez ce qu’elles appliquent (les élites occidentales) à leurs propres peuples : la destruction de la famille, de la culture et de l’identité nationale, la perversion, les moqueries vis-à-vis des enfants, et même la pédophilie, sont considérées comme des normes, des normes
de vie ; les mariages entre personnes de même sexe que les serviteurs de Dieu, les prêtres sont obligés de bénir ». [...]
Миллионы людей на Западе понимают, что их ведут к настоящей духовной
катастрофе. Des millions de gens à l’ouest comprennent qu’on les mêne à une véritable catastrophe spirituelle ».

J’ai l’impression de lire des fadaises quasi médiévales des illuminés de Trump et d’autres gourous, complotistes

Les stupidités calomnieuses, chauvines de Poutine étaient prévisibles. Pourquoi les grands syndicats et partis se disant de gauche, de la France à l’Inde en passant par l’Afrique et l’Amérique latine, soutiennent-ils un dictateur sanglant ?
Il est contre l’impérialisme des USA qui sont le symbole du capitalisme et de
l’exploitation de toute la planète, ce qui « purifie » ses forfaits !
Et que veulent toutes les élites de gauche et la multitude de pays qui sont sur ce point d’accord avec elles : le pouvoir, comme celui de Poutine, comme celui des pays occidentaux.

Mais il existe une différence, les uns guident le peuple, les autres lui accorde l’égalité juridique. Et de fait, cette différence existe aussi dans les autres pays, mais si elle est partout, on ne trouve nulle part l’égalité économique, soulignée, désirée par Michel Bakounine.

L’égalité économique implique la fin de la corruption et de l’exploitation sociale, la destruction du capitalisme privé et étatique dans les pays occidentaux, en Afrique et en Asie.
Évidemment, il est plus aisé de voter de temps en temps pour un prétendu politicien de gauche !
Et ils sont tous ridicules, ces syndicats et partis anti-USA et si semblable à ce pays, face aux femmes iraniennes (croyantes et athées) et aux citoyens et aux travailleurs qui partagent leur haine des exploiteurs religieux et de leurs complices (10 % de la population).
Ils parlent peu et agissent moins encore !
Pourtant, ils peuvent empêcher l’Iran des mollahs d’aider la Russie en armant les Kurdes d’Irak en chars leopard, en drones, en volontaires, etc., pour collaborer avec les Iraniennes pour renverser le pouvoir des tortionnaires
Pourtant Poutine et ses courageux partisans d’Afrique, d’Amérique, d’Asie, et d’Europe (sans oublier les vaillants admirateurs de la CGT de Martinez et du parti de Mélenchon) peuvent secourir le régime des mollahs anti USA. Avec leurs groupes de volontaires, aux côtés des milices de Wagner, de courageux militaires russes antinazis de Boutcha et d’autres villes et villages d’Ukraine, ils sont capables de « convaincre » les iraniennes de ne pas freiner la juste politique anti USA du gouvernement des mollahs !

Quand à moi, je suis tout simplement avec les camarades anarchistes et d’autres tendances socialistes qui défendent leurs citoyens et le pays où ils se trouvent.
Ils luttent les armes à la main contre les impérialistes russes. Ensuite avec les
travailleurs (en conservant leurs armes) ils arracheront aux patrons et aux oligarques ukrainiens le plus possible de liberté et d’égalité économique.
Les anarchosyndicalistes de l’Espagne révolutionnaires de 1936-1939 ne faisaient pas autre chose contre les militaires catholiques et leurs fidèles, les nazis, les fascistes italiens, tous soutenus par les communistes et bien des capitalistes basques et catalans, et l’appui plus ou moins discret de l’URSS et des USA.