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France : Insultes, dégradations et saluts nazis à la marche des fiertés de Bordeaux : neuf hommes en procès

vendredi 12 mai 2023, par siawi3

Source : https://www.lefigaro.fr/bordeaux/insultes-degradations-et-saluts-nazis-a-la-marche-des-fiertes-de-bordeaux-neuf-hommes-en-proces-20230407

Insultes, dégradations et saluts nazis à la marche des fiertés de Bordeaux : neuf hommes en procès

Par Jean Cittone

Publié le 07/04/2023 à 19:48 , Mis à jour le 08/04/2023 à 12:11

Photo : La marche des fiertés a réuni environ 5000 personnes à Bordeaux en 2022. JEAN-PIERRE MULLER / AFP

Lors de la dernière marche des fiertés à Bordeaux, neuf personnes ont brandi une pancarte hostile aux personnes LGBT depuis le toit de la maison écocitoyenne. Des vidéos les montrent scandant des slogans homophobes et réalisant des saluts nazis.

L’extrême droite de nouveau face à la justice. Les 23 et 24 mars, huit hommes du groupuscule Bordeaux Nationaliste (désormais dissous) avaient été jugés à Bordeaux, pour des agressions contre des riverains du quartier Saint-Michel commises l’été dernier. Deux d’entre eux étaient à nouveau devant le tribunal ce vendredi, pour des actions violentes commises à la même période, lors de la marche des fiertés. Au total, neuf prévenus, dont sept présents à l’audience, étaient convoqués pour des faits remontant au 12 juin 2022.

Peu de temps avant que le cortège de la marche des fiertés ne passe devant la maison écocitoyenne, les neuf hommes étaient montés sur le toit du bâtiment, visages masqués, et avaient déployé face aux manifestants une pancarte avec les mentions « Protégeons les enfants » et « Stop folie LGBT » (le sigle LGBT englobe les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres). Il leur est aussi reproché d’avoir effectué des saluts nazis, proclamé des slogans homophobes tels que « Sale PD », « À mort les PD », « On encule LGBT » et « Dans le cul LGBT ». Ces deux dernières phrases ainsi que les saluts nazis sont attestés par plusieurs vidéos prises par des membres du cortège.

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Des militants issus de Génération Z

Le lendemain, la mairie de Bordeaux avait déposé plainte pour des dégradations sur un passage piéton aux couleurs de l’arc-en-ciel, cours du Chapeau-Rouge, recouvert de peintures bleu blanc rouge, de l’inscription « patrie » et d’une étoile de David. Les slogans « Fuck LGBT », « Stop LGBT » et « No homo » avaient également été retrouvés sur du mobilier public. L’enquête avait permis de reconnaître plusieurs individus interpellés sur le toit de la maison écocitoyenne comme étant les auteurs des dégradations sur le passage clouté.

Devant le tribunal, les sept prévenus ont été interrogés sur ce qu’ils entendaient par « folie LGBT » et « lobby LGBT », afin de comprendre leurs motivations. Plusieurs ont avancé que les tenues de certains participants à la marche des fiertés ne devraient pas être autorisées sur la voie publique, comme le fait de défiler seins nus. Quant à l’inscription « Protégeons nos enfants » sur la pancarte, l’un des sept prévenus, également entendu par la justice sur les violences commises dans le quartier Saint-Michel, a expliqué par exemple être « contre l’endoctrinement des enfants », et notamment « le fait de leur donner des idées, des alternatives sexuelles, des trucs assez bizarres avec toutes sortes d’objets, déplacés pour des enfants ».

Les neuf hommes se sont pour la plupart connus lors de la dernière campagne présidentielle, ayant tous été militants ou sympathisants de Génération Z, le mouvement de jeunesse d’Éric Zemmour. Ils auraient prévu cette action de concert, en réalisant la banderole et en achetant des fumigènes aux couleurs de la France. Tous les prévenus ont cependant nié en bloc avoir effectué des saluts nazis lorsqu’ils étaient sur le toit de la maison écocitoyenne, malgré la présentation en salle d’audience de preuves par l’image. « Ce n’était pas un salut nazi mais un “clapping” », explique Enzo L., comme ceux effectués dans les stades lors de matchs sportifs. Pourtant, la procureure a fait remarquer que, parce qu’ils tenaient la banderole, il était difficile pour les prévenus de réussir à taper dans leurs mains.

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Une explosion des violences homophobes

Plusieurs associations se sont portées partie civile à ce procès, parmi lesquelles la Ligue des droits de l’Homme, SOS Homophobie, le Girofard, Mousse, ADHEOS et Stop Homophobie. L’un des représentants des parties civiles, Maître Thibault Laforcade, a jugé important de rappeler aux prévenus l’origine de la marche des fiertés. En 1969, huit policiers en civil étaient entrés dans un bar new-yorkais et avaient brutalisé plusieurs personnes, « simplement parce qu’ils étaient des hommes, qu’ils dansaient ensemble et qu’ils s’embrassaient ». Un an plus tard, la première « Pride » avait eu lieu, à New York, rassemblant plusieurs associations luttant contre les discriminations.

En France, la première marche des fiertés date de 1977. À l’époque, on trouvait parmi les slogans à leur encontre : « Tuer un homosexuel pour l’amour du Christ ». Depuis, les marches des fiertés sont devenues des rassemblements festifs, des carnavals, mais au sein desquels « la notion de rassemblement, n’en déplaise à certains, est fondamentale », a martelé Maître Laforcade. « L’objectif premier de la marche est de faire corps, de ne plus avoir peur. » Selon l’avocat, « lorsqu’on déploie cette banderole, qu’on a ce type d’injures, qu’on fait des saluts nazis, on sait ce qu’on invoque, qu’on se réfère à une certaine partie de l’histoire où le vice homosexuel devait être purgé ». Il a d’ailleurs précisé la consigne glaçante donnée à la fin de cette manifestation : « ne rentrez pas seuls ».

L’élève-avocat Antoine Genet, lors de sa plaidoirie, a quant à lui précisé que « depuis les cinq dernières années, la France a connu une explosion des violences homophobes », selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, avec « 75% d’augmentation des infractions homophobes commises dans l’espace public » entre 2016 et 2021. Le futur avocat rappelle que « 60% des LGBT qui vivent une agression à caractère homophobe pensent dans l’année qui suit à mettre fin à leurs jours ». Selon lui, « s’attaquer à la marche des fiertés, c’est montrer cette haine de l’expression de la liberté des personnes LGBT ».

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Une peine d’emprisonnement avec sursis requise

L’avocat de la défense, Maître Pierre-Marie Bonneau, a quant à lui voulu insister sur une « volonté de choquer » de la part des manifestants participant à la marche des fiertés. Selon l’avocat, ces personnes jugeraient que « c’est ça notre identité, si vous ne l’acceptez pas, vous l’accepterez au forceps ou au coup sur la tête ». Parlant d’un « exhibitionniste forcené de la part de militants politiques », l’avocat a accusé les participants du cortège bordelais d’être « des extrémistes, des militants politiques qui veulent volontairement choquer pour faire passer un message ». Selon lui, « c’est cela qui a choqué d’autres militants politiques, qui ont voulu apporter une réponse ».

La procureure de la République, estimant avoir affaire à « des prévenus qui ont tenté parfois de se victimiser », - ces derniers ayant en effet essuyé des jets de projectiles de la part des manifestants contre lesquels ils avaient réalisé cette banderole - a considéré que « la liberté d’expression ne signifie pas qu’on peut écrire tout ce qu’on veut, monter sur le toit d’une maison et faire valoir son opinion ». Déplorant « un discours pas très construit pour des militants » et des « amalgames coupables », la représentante du ministère public a estimé que les prévenus devaient être condamnés pour des faits de provocation à la haine et à la violence. Elle a proposé « une peine d’avertissement ». Contre deux des prévenus, Enguerrand O. et Yanis I., la procureure a demandé dix mois d’emprisonnement, avec sursis, et une amende de 1000 euros. Pour les autres prévenus, elle a également requis six mois d’emprisonnement, toujours avec sursis. Aucun d’entre eux ne risque donc de prison ferme, à moins d’une récidive.

Maître Daniel Lasserre, représentant la ville de Bordeaux et la métropole, a sollicité quant à lui la somme symbolique d’un euro, en réparation du préjudice, estimant que « l’émotion ne se chiffre pas en termes de deniers », bien que le coût de ces dégradations commises durant la marche des fiertés soit estimé à près de 15.000 euros. Après une audience qui a duré une bonne partie de la journée, le jugement a été mis en délibéré. Le tribunal rendra sa décision le 26 mai.

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